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Alors, la reine dit aux soldats qu’elle leur donnerait des logements meilleurs, et elle fit construire des maisons de pierre, couvertes de tuiles. La ville fut bâtie en quatre-vingts jours, et la reine la baptisa d’un nom, qui affirmait sa foi, et sa confiance dans le succès définitif de ses armes — Santa-Fe.

Quand les Maures virent cette ville remplacer, comme par enchantement, de simples tentes en toile, ils comprirent que les rois catholiques étaient bien décidés à ne pas abandonner le siège de Grenade, et le découragement s’empara d’eux.

Cependant, ils résistèrent longtemps encore, et avec courage. Plusieurs fois, ils sortirent de leurs remparts, et vinrent attaquer l’armée chrétienne, qui s’était emparé des villages environnants, et leur coupait les vivres ; mais Gonzalve de Cordoue les repoussait toujours, et bientôt la famine se fit sentir dans Grenade.

Enfin, on raconte que, dans un engagement, pendant lequel la reine Isabelle à genoux priait Dieu, les chrétiens, sans perdre un seul homme, tuèrent 600 Maures, en firent 1400 prisonniers, et s’emparèrent de l’artillerie ennemie.

Ce succès décida les Maures à capituler, et le roi Abu-abd-Allah, allant à la rencontre des rois Ferdinand et Isabelle, leur remit les clefs de la ville.

Quelques jours après, les rois catholiques firent leur entrée dans la fameuse citadelle, regardée comme imprenable, que Mahomet avait promis de toujours défendre, et ils firent célébrer le sacrifice divin à l’Alhambra.