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& les affronts qui nous en ont fait déchoir ? Ils sont présens a votre mémoire, ces affronts cruels, & vous montre par votre ardeur a en éteindre l’odieuse cause, combien vous êtes peu disposes a les endurer. Oui, Messieurs, c’est cette dangereuse Musique étrangere qui, sans autre secours que ses propres charmes, dans un pays etoit contre elle, a failli détruire la notre qu’on joue si a son aise. C’est elle qui nous perd d’honneur & c’est contre elle que nous devons tous rester unis jusqu’au dernier soupir.

Je me souviens, qu’avertis du danger par les premiers succès de la Serva Padrona, & nous étant assembles en secret pour chercher les moyens d’estropier cette Musique enchanteresse, le plus qu’il seroit possible, l’un de nous, que j’ai reconnu depuis pour un faux frere *

[*Il y a quelques jours que, poliçonnant avec lui a l’Opéra, comme vous avons tous accoutume de faire, je surpris dans sa poche un papier qui contenoit cette scandaleuse épigramme.

Ô Pergolese inimitable,

Quand notre Orchestre impitoyable

Te fait crier sous son lourd violon,

Je crois qu’as rebours de la Fable,

Marsyas écorche apollon.

Ils sont comme cela, deux ou trois dans l’Orchestre qui s’avisent de blâmer vos cabales, qui osent publiquement approuver la Musique Italienne, & qui, sans égards pour le Corps veulent se mêler de faire leur devoir & d’être honnêtes-gens. Mais nous comptons les faire bientôt déguerpir a force d’avanies, & nous ne voulons souffrir que des Camarades qui fassent cause commune avec nous.] s’avisa de dire, d’un ton moitie goguenard, que nous n’avions que faire de tant délibérer & qu’il faloit hardiment la jouer tout de notre mieux : jugez de ce qu’il en seroit arrive si nous eussions eu la maladroite modestie de suivre cet avis, puisque tous nos soins, joints a nos grands talens pour laisser aux Ouvrages que nous