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tems inégaux, ou par des modifications des lèvres, de la langue ou du palais, qui font la diversité des voix ; aucun par des modifications de la glotte, qui font la diversité des sons. Ainsi, quand notre circonflexe n’est pas une simple voix, il est une longue, ou il n’est rien. Voyons à présent ce qu’il étoit chez les Grecs.

Denys d’Halycarnasse dit que l’élévation du ton dans l’accent aigu & l’abaissement dans le grave étoient d’une quinte : ainsi l’accent prosodique étoit aussi musical, surtout le circonflexe, où la voix, après avoir monté d’une quinte, descendoit d’une autre quinte sur la même syllabe (*). On voit assez par ce passage & par ce qui s’y rapporte que M. Duclos ne reconnoît point d’accent musical dans notre langue, mais seulement l’accent prosodique & l’accent vocal. On y ajoute un accent orthographique, qui ne change rien à la voix, ni au son, ni à la quantité, mais qui tantôt indique une lettre supprimée, comme le circonflexe, & tantôt fixe le sens équivoque d’un monosyllabe, tel que l’accent prétendu grave qui distingue où adverbe de lieu de ou particule disjonctive, & à pris pour article du même a pris pour verbe ; cet accent distingue à l’œil seulement ces monosyllabes, rien ne les distingue à la prononciation (+). Ainsi la définition de l’accent que les Français ont généralement adoptée ne convient à aucun des accens de leur langue.


(*) M. Duclos, Rem. Sur la gram. générale et raisonnée, p.30.

(+) On pourrait croire que c’est par ce même accent que les Italiens distinguent, par exemple, è verbe de e conjonction ; mais le premier se distingue à l’oreille par un son plus fort et plus appuyé, ce qui rend vocal l’accent dont il est marqué : observation que le Buonmattei a eu tort de ne pas faire.