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la Musique, quand Gui d’Arezze *

[* Soit Gui d’Arezze, soit Jean de Mure, le nom de l’Auteur ne fait rien au systême, & je ne parle du premier que parce qu’il est plus connu.] s’avisa de supprimer tous les caracteres qu’on y employoit, pour leur substituer les notes qui sont en usage aujourd’hui. Ce qu’il y a de vraisemblable, c’est que ces premiers caracteres etoient les mêmes avec lesquels les anciens Grecs exprimoient cette Musique merveilleuse, de laquelle, quoiqu’on en dise, la notre n’approchera jamais, quant à ses effets ; & ce qu’il y a de sûr, c’est que Gui rendit un sort mauvais service à la Musique, & qu’il est fâcheux pour nous qu’il n’ait pas trouvé en son chemin des Musiciens aussi indociles que ceux d’aujourd’hui.

Il n’est pas douteux que les lettres de l’Alphabet des Grecs, ne fussent en même tems les caracteres de leur Musique, & les chiffres de leur Arithmétique : de sorte qu’ils n’avoient besoin que d’une seule espece de signes, en tout au nombre de vingt-quatre, pour exprimer toutes les variations du discours, tous les rapports des nombres, & toutes les combinaisons des sons ; en quoi ils étoient bien plus sages ou plus heureux que nous, qui sommes contraints de travailler notre imagination sur une multitude de signes inutilement diversifiés.

Mais, pour ne m’arrêter qu’à ce qui regarde mon sujet, comment se peut-il qu’on ne s’apperçoive point de cette foule de difficultés que l’usage des notes à introduites dans la Musique, ou que, s’en appercevant, on n’ait pas le courage d’en tenter le remede, d’essayer de la ramener à sa premiere simplicité,