Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t7.djvu/605

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

SECONDE LETTRE.

Sur les Mousses.
A Paris le 19 Décembre 1771.

VOici, Monſieur, quelques échantillons de Mouſſes que j’ai raſſemblées à la hâte, pour vous mettre à portée au moins de diſtinguer les principaux genres avant que la ſaiſon de les obſerver ſoit paſſée. C’eſt une étude à laquelle j’employai délicieuſement l’hiver que j’ai paſſe à Wootton, où je me trouvois environné de montagnes, de bois & de rochers tapiſſés de Capillaires & de Mouſſes les plus curieuſes. Mais depuis lors j’ai ſi bien perdu cette famille de vue, que ma mémoire éteinte ne me fournit preſque plus rien de ce que j’avois acquis en ce genre, & n’ayant point l’ouvrage de Dillenius, guide indiſpenſable dans ces recherches, je ne ſuis parvenu qu’avec beaucoup d’effort & ſouvent avec doute à déterminer les eſpeces que je vous envoye. Plus je m’opiniâtre à vaincre les difficultés par moi-même & ſans le ſecours de perſonne, plus je me confirme dans l’opinion que la Botanique, telle qu’on la cultive, eſt une ſcience qui ne s’acquiert que par tradition ; on montre la plante, on la nomme ; ſa figure & ſon nom ſe gravent enſemble dans la mémoire. Il y a peu de peine à retenir ainſi la nomenclature d’un grand nombre de plantes, mais quand on ſe croit pour cela Botaniſte, on ſe trompe, on n’eſt qu’Herboriſte, & quand il s’agit de déterminer par