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tement. Mais cette tranquillité fut troublée par les excès des Cohortes détachées de la quatorzieme Légion, dont j’ai parlé ci-devant, & que Valens avoit jointes à ſon armée. Une querelle qui devint émeute s’éleva entre les Bataves & les Légionnaires, & les uns & les autres ayant ameuté leurs camarades, on étoit ſur le point d’en venir aux mains, ſi par le châtiment de quelques Bataves, Valens n’eût rappellé les autres à leur devoir. On s’en prit mal-à-propos aux Eduens du ſujet de la querelle. Il leur fut ordonné de fournir de l’argent, des armes & des vivres gratuitement. Ce que les Eduens firent par force, les Lyonnois le firent volontiers : auſſi furent-ils délivrés de la Légion Italique & de l’eſcadron de Turin qu’on emmenoit, & on ne laiſſa que la dix-huitieme Cohorte à Lyon, ſon quartier ordinaire. Quoique Manlius Valens Commandant de la Légion Italique eût bien mérité de Vitellius, il n’en reçut aucun honneur. Fabius l’avoit deſſervi ſecrétement, & pour mieux le tromper, il affectoit de le louer en public.

Il régnoit entre Vienne & Lyon d’anciennes diſcordes que la derniere guerre avoir ranimées : il y avoit eu beaucoup de ſang verſé de part & d’autre, & des combats plus fréquens & plus opiniâtres que s’il n’eût été queſtion que des intérêts de Galba ou de Néron. Les revenus publics de la Province de Lyon avoient été confiſqués par Galba ſous le nom d’amende. Il fit, au contraire, toute ſorte d’honneurs aux Viennois, ajoutant ainſi l’envie à la haine de ces deux Peuples, ſéparés ſeulement par un fleuve, qui n’arrêtoit pas leur animoſité. Les Lyonnois animant donc le ſoldat, l’excitoient à détruire Vienne