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les connoisseurs, les arbitres du Théâtre ; nous n’en voudrons pas moins décider pour notre argent., & n’en serons, que plus ridicules. On ne l’est point pour manquer de goût, quand on le méprise ; mais c’est l’être que de s’en piquer & n’en avoir qu’un mauvais. Et qu’est-ce au fond que ce goût si vante ? L’art de se connoître en petites choses. En vérité, quand on en a une aussi grande.a conserver que la liberté, tout le reste, est bien puérile.

Je ne vois qu’un remede à tant d’inconvéniens : c’est que, pour nous approprier les Drames de notre Théâtre, nous les composons nous-mêmes., & que nous ayons des Auteurs avant des Comédiens. Car il n’est pas bon qu’on nous montre toutes sortes d’imitations, mais seulement celles des choses honnêtes, & qui conviennent à des hommes libres.*

[* Si quis ergo in nostram urbem venerit, qui animi sapientià in omnes possit sese vertere formas, & omnia imitari, volueritque poemata sua oftentare, venerabimur quidem ipsum, ut sacrum, admirabilem, & jucundum : dicemus auteur non esse ejusmodi hominem in republica nostra, neque fas esse ut insit, mittemusque in aliam urbem, unguento caput ejus perungentes ; lanaque coronantes. Nos autem austeriori minusque jucundo utemut Poetà, fabularumque fictore, utilitatis gratià, qui decori nobis rationem exprimat, & quae dici debent dicat in his formulis quas à principio pro legibus tulimus, quando cives erudire aggressi fumus. Plat. de Rep. Lib. III.] Il est sur que des Pieces tirées comme celles des Grecs des malheurs passes de la patrie, ou des défauts présens du peuple, pourroient offrir aux spectateurs des leçons utiles. Alors quels seront les héros de nos Tragédies. Des Berthelier ? des Levrery ? Ah, dignes citoyens ! Vous fûtes des héros, sans doute ; mais votre obscurité vous avilit, vos noms communs