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de plusieurs usages essentiels, & de diverses réformes très-heureuses. L’enfance, cette enfance qui réunit les plus vives espérances & les plus douces consolations soit des familles particulieres, soit de la famille générale, la patrie ; cette enfance si intéressante à considérer sous tous ces aspects, lui doit particuliérement & sans qu’elle le fâche, sa liberté, santé, & par conséquent tout le bonheur qu’on peut goûter cet âge ; & l’on se rappellera que sur ce point les tendres, meres, persuadées les premieres, persuaderent à leur tour les époux ; car en matiere de sentiment, cette partie du genre humain marche toujours la premiere & guide l’autre.

La société entiere lui doit une foule de notions qui sont autant de maximes & de regles dans la pratique des devoirs de la vie. C’est à ces traits que le génie se reconnoît & qu’un œuvre se marque du sceau de l’immortalité. De tels écrits restent à jamais : ils se propagent ; ils agissent sans cesse. Dans le moment où j’écris, ô pouvoir étonnant de la pensée ! Emile en ce qu’il a d’utile ( & cette partie n’est pas peu considérable) opere sur la félicité de nombre d’êtres. Traduit dans plus d’une langue, il parcourt les hémispheres, & augmente ainsi sur la terre la somme du bonheur & la masse des lumieres.

Ce livre instruit les générations présentes dans l’art de former les générations qui doivent suivre, par la doctrine qu’il offre sur le gouvernement de l’enfance, sur la direction de la jeunesse, ainsi que sur la capacité & les forces de ces deux âges : vues qui, à quelques points près, où les principes de l’Auteur, suivant son génie, sont souvent trop outrés, paroissent au fond dictées par la raison même. C’est réellement dans