Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t15.djvu/150

Cette page n’a pas encore été corrigée

Que M. R. lise donc les livres, avant que de faire des livres, & qu’il soit au moins savant & érudit, avant que de raisonner, philosopher & dogmatiser. Il raisonne, il philosophe à vuide, lorsqu’il le fait sur des idées d’imagination, sans aucune connoissance de ce qu’on appelle la positive, l’histoire, les faits. Le monde ne s’est pas fait tout à l’heure, & le Créateur seul a pu le deviner, avant que de le voir : encore le voyoit-il en lui-même de toute éternité.

A coup sûr,, tous ces prétendus Philosophes qui infestens les sciences & la religion, sont communément gens qui ne sa vent rien &qui veulent pourtant faire un personnage dans la littérature, & parmi les savans & à leurs dépens, sans avoir jamais eux-mêmes rien appris ni étudié.

Il n’y faut pas même grande science, lecture ni étude, mais un peu de soi, de bonne soi, de docilité, de modestie, de pureté de cœur & d’intention pour lire, ne fût-ce que le dixieme chapitre de la Genese, avec le neuvieme qui précédé & le onzieme qui suit tout au plus, & y voir, les divisions & sous-divisons, branches & rameaux généalogiques de la grande famille de Noé, toutes les têtes des nations d’aujourd’hui, tous les chefs & sous-chefs numérotés, étiquetés, caractérisés.

C’est bien la faute de l’histoire profane, si elle est aussi pleine de faussetés, de fables, d’incertitude & de lacunes qu’elle l’est communément. L’Histoire sainte a mené celle des hommes en général, jusqu’aux Grecs & aux Romains inclusivement ; pour le moins, nulle histoire n’a droit de s’égaler à celle-ci beaucoup moins de s’élever au-dessus, par une frivolité de style puriste ou grammatical.