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n’aime pas, à cause qu’il le soupçonne d’être en correspondance avec celui qui l’a plaisanté ; en vérité on ne peut s’empêcher de crier à la folie. En peut-on faire moins, lorsqu’il fait un crime à son ami de ses longs regards, de son ton de voix, de ses gestes, de son flegme & de sons silence ? Etoit-ce dans l’ordre des bienséances de montrer de l’humeur & des caprices outrés vis-à-vis de celui qui témoignoit tant de bonne volonté pour lui ? Y avoit-il rien de plus choquant que de le bouder, de se lever brusquement en sa présence, de se promener en affectant les bras croisés, & tout à coup de se jetter à son cou, de l’embrasser, de pleurer, de lui demander pardon, & de s’écrier : non, D. Hume n’est pas un traître, &c. Combien d’autres traits semblables ne pourrois-je pas répéter pour prouver que ce-n’est pas ainsi qu’on doit agir à l’égard de ceux qui s’emploient à nous rendre heureux, & qu’une telle conduite, en remontant jusqu’à la maladie d’où elle dérive, est bien plus digne de pitié que de ressentiment ?

Malgré toute la conduite réservée de M. Hume & toute la sagesse qui brille dans ses œuvres, qu’il me permette de lui demander où étoient ses yeux & ses oreilles quand son nouvel ami s’abandonnoit en sa présence à tant d’excès déraisonnables. N’étoit-il pas lui-même un peu affecté de la même maladie ? Est-ce que celle que Rousseau apportoit en Angleterre seroit devenue épidémique au-delà de la mer ? Je serois tenté à le croire ; il falloit être bien préoccupé ou bien aveuglé pour ne pas se persuader que tant d’extravagances n’étoient que les accès de la maladie de ce Genevois, il falloit que M. Hume