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plus d’une fois toutes les opinions à la sienne : c’est-là qu’il eut étonné par la solidité de ses raisons, ces esprits plus subtils que judicieux, qui ne peuvent comprendre que dans le gouvernement des Etats être juste soit la suprême politique : c’est-là, pour tout dire en un mot, que secondant les vues bienfaisantes du Monarque qui nous rend heureux, il concouroit à le rendre heureux lui-même en travaillant avec lui pour le bonheur de ses peuples.

Mais le respect m’arrête, & je sens qu’il ne m’est point permis de porter des regards indiscrets sur ces mysteres du cabinet, où les destins de l’Etat sont en secret balancés au poids de l’équité & de la raison ; & pourquoi vouloir en apprendre plus qu’il n’est nécessaire ? Je l’ai déjà dit ; pour honorer la mémoire d’un si grand homme nous n’avons pas besoin de compter tous les devoirs qu’il a remplis, ni toutes les vertus qu’il a possédées. Hâtons-nous d’arriver à ces doux momens de sa vie, où tout-à-fait retiré dû monde, après avoir acquitté ce qu’il devoit à sa naissance & à son rang, il se livra tout entier dans sa solitude aux penchans de son cœur & aux vertus de son choix.

C’est alors qu’on le vit déployer cette ame bienfaisante dont l’amour de l’humanité fit le principal caractere, & qui ne chercha son bonheur que dans celui des autres. C’est alors que s’élevant à une gloire plus sublime, il commença de montrer aux hommes un spectacle plus rare & infiniment plus admirable que tous les chefs-d’œuvre des politiques, & tous les triomphes des conquérans. Oui, Messieurs, pardonnez-moi dans ce jour de tristesse cette affligeante remarque. L’histoire