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étoit un homme, sujet à toutes les foiblesses de l’humanité ; que dans le rang qu’il occupoit, il avoir de grands devoirs à remplir & de grandes erreurs à craindre. Il comprit que ces premieres connoissances lui imposoient l’obligation d’en acquérir beaucoup d’autres. Il se livra avec ardeur à l’étude, & il travailla à se faire dans les bons Auteurs, & sur-tout dans nos Livres sacrés des amis fideles & des conseillers sinceres qui, sans songer sans cesse à leur intérêt, lui parlassent quelquefois pour le sien. Le succès fut tel qu’on pouvoit l’attendre de ses dispositions. Il cultiva toutes les sciences il apprit toutes les langues, & l’Europe vit avec étonnement un Prince tout jeune encore fâchant par soi -même, & ayant des connoissances à lui.

Telles furent les premieres sources des vertus dont il orna & édifia le monde. À Peine fut-il livré à lui-même qu’il les mit toutes en pratique. Uni par les nœuds sacrés à une épouse chérie & digne de l’être, il fit voir par sa douceur, par ses égards & par sa tendresse pour elle que la véritable piété n’endurcit point les cœurs, n’ôte rien à l’agrément d’une honnête société, & ne fait qu’ajouter plus de charme & de fidélité à l’affection conjugale. La mort lui enleva cette vertueuse épouse à la fleur de son âge, & s’il témoigna par sa douleur combien elle lui avoir été chere, il montra par sa confiance que celui qui n’abuse point du bonheur ne se laisse point non plus abattre par l’adversité. Cette perte lui apprit à connoître l’instabilité des choses humaines, & l’avantage qu’on trouve à réunir toutes ses affections dans celui qui ne meurt point. C’est dans ces circonstances qu’il se choisit une pieuse