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LETTRE À MYLORD COMTE DE WEMYSS.

Vous le voulez, Mylord, & l’honneur l’exige ; il faut obéir. Il faut malgré moi reprendre la plume & vous achever la relation commencée dans ma lettre du 14 avril. Entraîné par mon attachement pour notre commune Patrie d’adoption, & ne craignant point d’être l’organe de la vérité, j’avois consenti sans peine à la publicité de cette lettre. Persuadé que la constitution de cet Etat si heureuse pour ses habitans, ne sauroit souffrir la moindre altération sans porter coup au bonheur des particuliers, & regardant l’arrêt du Conseil du 2 avril comme un titre important à cette constitution & à tous les sujets de cet Etat, j’ai cru bien mériter de la Patrie, en le rendant public par la voie de l’impression.

À ce motif si fort sur mon cœur, s’en joignoit un autre qui ne l’étoit gueres moins, l’honneur de défendre un ami, un homme de bien,*

[*Je ne puis me refuser la satisfaction de vous transcrire ici, partie d’une lettre de M. S. B. Cet artiste citoyen de cet Etat, & distingué par ses talens, ses connoissances & son mérite personnel, s’exprime ainsi : "Je vais souvent, me dit-il, visiter l’ancienne demeure de M. Rousseau, appellée l’Hermitage ; c’est à deux pas d’une petite maison de campagne à moi. La mémoire de notre estimable philosophe y est dans la plus grande vénération. Je suis toujours dans l’enchantement lorsque je puis en parler avec les habitans de ce Canton, qui le regardoient comme leur pere, & l’arbitre de leurs différends. C’étoit Rousseau qui aidoit à les soulager, & qui rétablissoit la paix dans les familles. C’est pourtant là l’homme que l’un a persécuté."] presque devenu la victime de la trame la plus odieuse. Ajoutez, Mylord, que pour remplir ce double