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mais vous me demandez mon sentiment ; il faut vous le dire, ou me taire, ou vous tromper. Des trois partis j’ai choisi le plus honnête, & celui qui pouvoit le mieux vous marquer, Madame, ma déférence & mon respect.

LETTRE À MADEMOISELLE DEWES.

Wootton le 9 Décembre 1766.

Ma belle voisine, vous me rendez injuste & jaloux pour la premiere fois de ma vie ; je n’ai pu voir sans envie les chaînes dont vous honoriez mon sultan ; & je lui ai ravi l’avantage de les porter le premier. J’en aurois dû parer votre brebis chérie, mais je n’ai osé empiéter sur les droits d’un jeune & aimable berger. C’est déjà trop passer les miens de faire le galant à mon âge ; mais puisque vous me l’avez fait oublier, tâchez de l’oublier vous-même, & pensez moins au barbon qui vous rend hommage, qu’au soin que vous avez pris de lui rajeunir le cœur.

Je ne veux pas, ma belle voisine, vous ennuyer plus longtems de mes vieilles sornettes. Si je vous contois toutes les bontés & amitiés dont votre cher oncle m’honore, je serois encore ennuyeux par mes longueurs ; ainsi je me tais. Mais revenez l’été prochain en être le témoin vous-même, & ramenez Madame la Comtesse,*

[*Mde. la Comtesse Cowper, veuve du feu Comte Cowper, & fille du Comte de Granville] à condition que nous serons