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LETTRES INÉDITES. 403»

contrastant, et point du tout, vous ne faites que des dis- parates. Vous commencez par emboucher la trompette pour célébrer Lydie, Féclat de ses sublimes vertus, la ma- jesté de ses charmes, ses beautés célestes, les miracles qui vous excitent à chanter sa gloire par des chants sur- humains... et puis le laboureur Philémon!... A’oilà une chute à se casser le cou.

La philosophie champêtre doit être toute en sentiments, en images ; la vôtre est en réflexions, en maximes ; vous dis- cutez des principes. Choqué vous-même de la métaphysique^ d’Ariste, vous croyez raccommoder cela par utie note ; vous vous trompez. Une note avertit de la faute et ne la raccom- mode point.

Vous croyez aussi bien amener Memnon : vous vous trompez encore. Arisfe veut peindre la vie champêtre à son fils Daphnis, qui la connaît aussi bien que lui. 11 fallait faire tout le contraire de ce que vous avez fait ; que Daph- nis, élevé à la ville, en fit une description pompeuse à son père ; que celui-ci lui traçât à son tour la vie champêtre, et que, sans métaphysique et sans maximes, il mît sa phi- losophie dans la comparaison.

Votre style est inégal, peu naturel, souvent guindé ; vous cherchez à être harmonieux, doux et cadencé, mais cela rend vos inversions dures ; on sent qu’il vous en coûte de prendre un air aisé. Vos chutes sont quelquefois heureuses, mais vous les manquez souvent : Cruel mylord^ rends-moi mon cœur ou rends-moi la présence!... Présence, quel mol! Pourquoi pas : Rends-moi moîi cœur ou rends-moi le tim ? Cela était plus simple et tombait mieux.

Je ne puis continuer cette censure ; je vous jure qu’elle me déplaît plus qu’à \ous. Concluons : il y a dans vos