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enfoncée », comme dirait Boileau, j’adresse une fervente prière à Celui qui me tendait une main aussi secourable sur cette terre d’exil, et je me jette ensuite dans les bras de Morphée, après avoir pris la précaution de fermer la fenêtre et la porte de ma chambre de manière à ne recevoir aucune visite nocturne. Je m’endors aussitôt comme l’enfant au berceau. J’étais heureux, et l’avenir me souriait.

« Une heure s’est à peine écoulée, que je suis éveillé tout à coup par un vent violent, qui secoue fortement les rideaux de mon lit. Je me mets sur mon séant et je porte un regard scrutateur dans tous les coins et les recoins. Ma porte et ma fenêtre sont encore fermées ; il n’y a rien de dérangé dans la chambre. Cette brise reste pour moi un mystère. Après tout, me dis-je, c’est peut-être un rêve que j’ai fait. Et je me recouche. Mais il n’y a pas dix minutes que je suis mollement étendu sur le duvet, — je ne dormais pas encore, je vous l’assure, — qu’une main invisible enlève toutes mes couvertures et les transporte au pied de ma couche. Je reste alors plus mort que vif. Le sifflement des balles piémontaises ne m’ont jamais causé une frayeur aussi grande. La peur m’obscurcit tellement la vue, que je ne distingue aucun objet dans mon réduit. Je voulais faire de la lumière, mais je ne pouvais même pas trouver les allumettes que j’avais déposées sur une petite table placée près de moi, j’étais devenu presque fou et je tremblais comme le condamné à