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DIETRICHSTEIN, de même.

Songez que si quelqu’un !…

LE DUC.

Songez que si quelqu’un !…La campagne finie !
Des cadavres flottant sur les glaçons d’un lac !
Mon grand-père venant voir mon père au bivouac !…

D’OBENAUS.

Monseigneur !

LE DUC, scandant impitoyablement.

Monseigneur !Au bi-vouac !

D’OBENAUS.

Monseigneur !Au bi-vouac !Voulez-vous bien vous taire

LE DUC.

Et mon père accordant la paix à mon grand-père !

DIETRICHSTEIN.

Si quelqu’un entendait…

LE DUC.

Si quelqu’un entendait…Et puis les drapeaux pris
Distribués ! — Huit à la ville de Paris !

(La comtesse et le jeune homme sont peu à peu sortis de derrière la paravent, pâles et frémissants. Leurs paquets refaits, ils essayent, sur la pointe du pied, de gagner la porte, tout en écoutant le duc. Mais, dans leur émotion, les boîtes et les cartons, leur échappant des mains, s’écroulent avec fracas.)

D’OBENAUS, se retournant et les apercevant.

Oh !

LE DUC, continuant.

Oh !Cinquante au Sénat !

D’OBENAUS.

Oh !Cinquante au Sénat !Cet homme et cette femme !…

DIETRICHSTEIN, se précipitant vers eux.

Voulez-vous vous sauver !

LE DUC, d’une voix éclatante.

Voulez-vous vous sauver !Cinquante à Notre-Dame !

D’OBENAUS.

Ah ! mon Dieu !

LE DUC, hors de lui, avec un geste qui distribue des milliers d’étendards.

Ah ! mon Dieu !Des drapeaux !