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LE DUC.

Ses sticks !…Oh ! et tes gants !Superbes, mon chéri !

LA PETITE FILLE, le doigt sur l’étoffe de son gilet.

C’est en quoi, ton gilet ?

LE DUC.

C’est en quoi, ton gilet ?C’est en Pondichéry.

THÉRÈSE, prise d’une envie de pleurer.

Oh !

L’ARCHIDUCHESSE, caressant du bout des doigts la rose qui fleurit la redingote du prince.

Oh !Tu portes ta fleur à la mode dernière !

LE DUC, se levant, avec une frivolité amère et forcée.

Vous remarquez ? Dans la troisième boutonnière !

(À ce moment, Thérèse éclate en sanglots.)
DES DAMES, autour d’elle.

Hein ? — Qu’a-t-elle ?

THÉRÈSE.

Hein ? — Qu’a-t-elle ?Pardon !… je ne sais pas… c’est fou !…
Seule ici… loin des miens… brusquement…

MARIE-LOUISE, qui s’approche, avec un attendrissement bruyant.

Seule ici… loin des miens… brusquement…Pauvre chou !

THÉRÈSE.

Mon cœur s’est si longtemps contenu…

MARIE-LOUISE, l’embrassant.

Mon cœur s’est si longtemps contenu…Qu’il s’épanche !

LE DUC, qui a fait quelques pas, sans avoir l’air de remarquer ces larmes, s’arrête, poussant du pied quelque chose sur le tapis.

Tiens ! qu’est-ce que j’écrase ? — Une cocarde blanche ?
(Il se penche et la ramasse.)

METTERNICH, s’avançant, avec embarras.

Heu !…

LE DUC, cherche un instant des yeux et voyant l’attaché français.

Heu !…Ce doit être à vous, Monsieur ! — Votre chapeau ?

(L’attaché le lui montre avec embarras. Le duc aperçoit la cocarde tricolore.)

Ah !
Ah !(À Metternich.)
Ah !Je ne savais pas… Mais alors… le drapeau ?