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(Ils sont dans les bras l’un de l’autre, pleurant et riant à la fois. La porte s’ouvre. Metternich paraît. Il est en grand costume habit vert chamarré d’or, culotte courte et bas blancs ; la Toison d’or jaillit de sa cravate. Il reste immobile une seconde, contemplant d’un œil de ministre ce tableau de famille.)
L’EMPEREUR, l’aperçoit, et vivement, au duc.

Metternich !

(Le grand-père et le petit-fils se séparent, comme pris en faute.)



Scène III

L’EMPEREUR, LE DUC, METTERNICH.
L’EMPEREUR, peu rassuré, au duc.

Metternich !Ne crains rien.

(Il se lève, et posant sa main sur la tête du prince qui est resté à genoux, il dit à Metternich d’une voix qu’il essaye de rendre ferme :)

Metternich !Ne crains rien.Je veux…

LE DUC, à part.

Metternich !Ne crains rien.Je veux…Tout est perdu !

L’EMPEREUR, avec beaucoup de force et de majesté.

Je veux que cet enfant règne.

METTERNICH, s’inclinant profondément.

Je veux que cet enfant règne.C’est entendu.
(Se tournant vers le duc.)
Avec vos partisans, Prince, je vais me mettre
En rapport…

LE DUC, étonné.

En rapport…Je craignais…

L’EMPEREUR, un peu étonné aussi, mais se redressant fièrement.

En rapport…Je craignais…Quoi donc ?… C’est moi le maître !

LE DUC, gaiement, prenant le bras de son grand-père.

Qui vas-tu m’envoyer, dis, comme ambassadeur ?

METTERNICH, descendant.

… Entendu !…

L’EMPEREUR, au duc, lui donnant une tape sur la joue.

… Entendu !…Tu viendras me voir, en empereur ?

LE DUC, avec importance.

Oui, peut-être, — quand mes Chambres seront sorties !