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LE HANNETON

— Je le vois ! s’écria-t-elle en riant.

Elle montrait les crins rudes qui couvraient le crâne officiel. L’autre y porta machinalement la main.

Les yeux de la folle se dilatèrent, elle se repentit de nouveau :

— Ne l’écrasez pas ! supplia-t-elle.

Elle éclata d’un fou rire : il ne l’avait pas écrasé ! Les yeux opaques se fixèrent sur les yeux clairs.

Ce fut un tableau d’intense clair-obscur, de la finesse de la folle à la massivité du brave homme.

— Allons ! soyez sage, et surtout ne faites plus de trous.

Il parlait paternellement, sur le bord de la loge, avec un rayon de soleil dans le dos.

— Rendez-le-moi ! Oh ! s’il vous plaît !

— Bon ! bon ! pas de bêtises.

Il sortit.

La folle essuya ses larmes et se mit au fond, dans l’angle des murailles. Elle était très grave, Derrière son joli front, qui se ridait alternativement, il parut se faire un remarquable travail de pensée.

La folle ne parla plus du hanneton. Le trou lui fut pardonné après que le gardien lui eut retenu un pain, qui fut consacré à la famille de cet excellent homme. Elle baissait vivement les yeux dès qu’il entrait dans sa loge. Belle, la poitrine tremblante, le saphir de ses yeux jetant des feux entre