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— Fille du Marécage, Naoh ne reviendra pas, il disparaîtra dans la terre, les eaux, le ventre des hyènes, ou il rendra le Feu aux Oulhamr. Il rapportera à Gammla des coquilles, des pierres bleues, des dents de léopard et des cornes d’aurochs.

À ces paroles, elle posa sur le guerrier un regard où palpitait la joie des enfants. Mais Faouhm, s’agitant avec impatience :

— Les fils de l’Aurochs ont disparu derrière les peupliers.

Alors Naoh se dirigea vers le sud.

Naoh, Gaw et Nam marchèrent tout le jour sur la savane. Elle était encore dans sa force : les herbes suivaient les herbes comme les flots se suivent sur la mer. Elle se courbait sous la brise, craquait sous le soleil, semait dans l’espace l’âme innombrable des parfums ; elle était menaçante et féconde, monotone dans sa masse, variée dans son détail et produisait autant de bêtes que de fleurs, autant d’œufs que de semences. Parmi les forêts de gramens, les îles de genêts, les péninsules de bruyères, se glissaient le plantain, le millepertuis, les sauges, les renoncules, les achillées, les silènes et les cardamines. Parfois, la terre nue vivait la vie lente du minéral, surface primordiale où la plante n’a pu fixer ses colonnes inlassables. Puis, reparaissaient des mauves et des églantines, des gôlantes ou des centaurées, le trèfle rouge ou les buissons étoilés.

Il s’élevait une colline, il se creusait une combe ; une mare stagnait, pullulante d’insectes et de reptiles ; quelque roc erratique dressait son profil de mastodonte ; on voyait filer des antilopes, des lièvres, des saïgas, surgir des loups ou des chiens, s’élever des outardes ou des perdrix, planer les ramiers, les grues et les corbeaux ; des chevaux, des