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 « Celuy est presque Dieu qui cognoist toutes choses,
Esloigné du vulgaire, et loin des courtizans,
De fraude et de malice impudens artizans.

Tantost j’errois seulet par les forests sauvages,
Sur les bords enjonchez des peinturez rivages,
Tantost par les rochers reculez et déserts,
Tantost par les taillis, verte maison des cerfs.
 
J’aimois le cours suivy d’une longue rivière.
Et voir onde sur onde allonger sa carrière,
Et flot à l’autre flot en roulant s’attacher,
Et pendu sur le bord me plaisoit d’y pescher,
Estant plus resjouy d’une chasse muette
Troubler des escaillez la demeure secrette.
Tirer avecq’la ligne en tremblant emporté
Le crédule poisson prins à l’haim apasté,
Qu’un grand Prince n’est aise ayant prins à la chasse
Un cerf qu’en haletant tout un jour il pourchasse.
Heureux si vous eussiez d’un mutuel esmoy
Prins l’apast amoureux aussi bien comme moy.
Que tout seul j’avallay, quand par trop désireuse
Mon ame en vos yeux beut la poison amoureuse.
 
Puis alors que Vesper vient embrunir nos yeux.
Attaché dans le ciel je contemple les cieux.