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MADRIGAL

Voyez comme tout change (hé qui l’eust espéré !)
Vous me souliez donner, maintenant je vous donne
Des bouquets et des fleurs : Amour vous abandonne,
Qui seul dedans mon cœur est ferme demeuré.

Des Dames le vouloir n’est jamais mesuré,
Qui d’une extrême ardeur tantost se passionne,
Tantost d’une froideur extrême l’environne,
Sans avoir un milieu longuement asseuré.

Voila comme Fortune en se jouant m’abaisse :
Vostre appréhension et vostre seul penser
Un temps furent à moy, or’ vostre amour me laisse.
Le temps peut toute chose à la fin effacer.
 
Ne vous mocquez pourtant du lien qui me presse,
Soyez douce à mon cœur sans tant le reblesser.
Dieu pour punir l’orgueil commet une Déesse
Son sein vous esclouyt, gardez de l’offenser.