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Que je ne suis plus au nombre
Des vivans, mais bien une ombre
De ceux qu’Amour et la Mort
Ont conduit delà le port
Compagnon des troupes vaines.

Je n’ay plus ny sang ny veines,
Ny flanc, ny poumon, ny cœur :
Long temps a que la rigueur
De ma trop fiere Cassandre
Me les a tournez en cendre.

Donc, si tu veux m’offenser.
Il te faut aller blesser
Le tendre corps de m’amie :
Car en elle gist ma vie.
Et non en moy qui mort suis.
Et qui sans ame ne puis
Sentir chose qu’on me fasse.
Non plus qu’une froide masse
De rocher ou de métal
Qui ne sent ne bien ne mal.


ODE XXIX.

Quand au temple nous serons
Agenouillez, nous ferons
Les dévots, selon la guise
De ceux qui pour louer Dieu
Humbles, se courbent au lieu
Le plus secret de l’Eglise.
Mais quand au lict nous serons
Entrelassez, nous ferons
Les lascifs, selon les guises
Des Amans, qui librement
Pratiquent folastrement
Dans les draps cent mignardises.
Pourquoy donque quand je veux
Ou mordre tes beaux cheveux.
Ou baiser ta bouche aimée,
Ou toucher à ton beau sein