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DES ODES.

Ie ne veux viure pour autruy.
Fol le Pelican qui ſe bleſſe
Pour les ſiens, & fol qui ſe laiſſe
Pour les ſiens trauailler d’ennuy.




ODE XVIII.



I’ay l’eſprit tout ennuyé
D’avoir trop eſtudié
Les Phenomenes d’Arate :
Il eſt temps que ie m’esbate
Et que i’aille aux champs iouër.
Bons Dieux ! qui voudroit louër
Ceux qui, collez ſus vn livre,
N’ont iamais ſoucy de vivre ?
Que nous ſert l’eſtudier,
Sinon de nous ennuyer ?
Et ſoin deſſus ſoin accreſtre,
A nous, qui ſerons peut-eſtre,
Ou ce matin, ou ce ſoir,
Victime de l’Orque noir ?
De l’Orque qui ne pardonne,
Tant il eſt fier à perſonne ?
Corydon, marche dauant,
Sçache où le bon vin ſe vend :
Fay refraiſchir ma bouteille,
Cerche vne fueilleuſe treille
Et des fleurs pour me coucher :
Ne m’achete point de chair,
Car tant ſoit-elle friande,
L’Eſté ie hay la viande.