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le théâtre nouveau

dans un cercle étroit, l’esprit se rétrécit ; l’homme grandit, quand son but s’élève. Et maintenant, au terme sérieux de ce siècle, où la réalité même devient poésie, où nous voyons de puissantes natures lutter sous nos yeux pour un prix important, où l’on combat pour les grands intérêts de l’humanité : la domination et la liberté, — maintenant, l’art aussi, sur le théâtre où il évoque des ombres, peut tenter un vol plus hardi ; il le peut, il le doit même, s’il ne veut s’effacer, couvert de honte, devant le théâtre de la vie. »

Nous n’avons pas à nous plaindre de notre destin. Il ne nous a point ménagé le travail et l’action. Heureuses les époques comme la nôtre, qui ont une tâche immense à accomplir ! Heureux les hommes qui succombent sous le poids d’une glorieuse fatigue ! Cela est mieux que de succomber sous l’ennui du néant, ou de contempler tristement l’œuvre accomplie par d’autres. Nous ne dirons pas, comme le mélancolique auteur des Caractères, fin et grêle reflet d’une époque épuisée : « Tout est dit et l’on vient trop tard. » — Rien n’a été dit encore pour la société nouvelle. Tout est à dire. Tout est à faire. À l’œuvre !