Page:Rolland Clerambault.djvu/75

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Farceur ! dit Clerambault, avec un bon rire, alors, qu’est-ce que vous faites, tout le jour, dans vos tranchées ?

— On se gare ; on tue le temps. C’est le plus grand ennemi.

Clerambault lui appliqua sur l’épaule une tape amicale.

— Vous en tuez aussi d’autres !

Maxime s’écarta, vit le bon regard curieux de son père, de sa mère, et dit :

— Non, non, parlons d’autre chose !

Et après un moment :

— Voulez-vous me faire un plaisir ? Ne me questionnez plus aujourd’hui.

Ils acquiescèrent, étonnés. Ils jugèrent que son état de fatigue avait besoin de ménagements ; et ils furent aux petits soins. Mais Clerambault, à tout instant, repartait malgré lui dans des apostrophes qui quêtaient une approbation. Le mot de « Liberté » ponctuait ses tirades. Maxime avait un pâle sourire et observait Rosine. L’attitude de la jeune fille était singulière. Quand son frère était entré, elle s’était jetée à son cou. Mais depuis, elle se tenait sur la réserve, on eût dit : à distance. Elle n’avait pas pris part aux questions des parents ; bien loin de provoquer les confidences de Maxime, elle paraissait les craindre ; l’insistance de Clerambault la mettait à la gêne ; la peur de ce que son frère aurait pu dire se trahissait, à des mouvements imperceptibles ou de fugitifs regards, que seul saisissait Maxime. Il éprouvait la même gêne ;