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Il en jouit d’abord, avec la passion qu’il mettait à tout[1]. L’influence personnelle de la comtesse Tolstoï fut précieuse pour l’art. Bien douée littérairement[2], elle était, ainsi qu’elle le dit, « une vraie femme d’écrivain », tant elle prenait à cœur l’œuvre de son mari. Elle travaillait avec lui, écrivait sous sa dictée, recopiait ses brouillons[3]. Elle tâchait de le défendre contre son démon religieux, ce redoutable esprit qui soufflait déjà, par moments, la mort de l’art. Elle tâchait que sa porte fût close aux utopies sociales[4]. Elle réchauffait en lui le génie créateur. Elle fit plus : elle apporta à ce génie la richesse nouvelle de son âme féminine. À part de jolies silhouettes dans Enfance et Adolescence, la femme est à peu près absente des premières œuvres

  1. « Le bonheur de famille m’absorbe tout entier. » (5 janvier 1863.) — « Je suis si heureux ! si heureux ! Je l’aime tant ! » (8 février 1863.) — Voir Vie et Œuvre.
  2. Elle avait écrit quelques nouvelles.
  3. Elle recopia, dit-on, sept fois Guerre et Paix.
  4. Aussitôt après son mariage, Tolstoï suspendit ses travaux pédagogiques, écoles et revue.