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[À BOSC, À PARIS[1].]
12 octobre [1785, — du Clos].

Eh ! bonjour donc, notre ami. Il y a bien longtemps que je ne vous ai écrit ; mais aussi je ne touche guère la plume depuis un mois, et je crois que je prends quelques-unes des inclinations de la bête dont le lait me restaure ; J’asine à force et m’occupe de tous les petits soins de la vie cochone de la campagne. Je fais des poires tapées qui seront délicieuses ; nous séchons des raisins et des prunes ; on fait des lessives, on travaille au linge ; on déjeune avec du vin blanc, on se couche sur l’herbe pour le cuver ; on suit les vendangeurs, on se repose au bois ou dans les prés ; on abat les noix, on a cueilli tous les fruits d’hiver, on les étend dans les greniers. Nous faisons travailler le docteur[2], Dieu sait ! Vous, vous le faites embrasser : par ma foi, vous êtes un drôle de corps.

Vous nous avez envoyé de charmantes relations qui nous ont singulièrement intéressés ; en vérité, vous devriez courir toujours pour le plus grand plaisir de vos amis, et surtout ne pas oublier de les visiter.

Adieu ; il s’agit de déjeuner et puis d’aller en corps cueillir les amandiers. Salut, santé et amitié par-dessus tout.


205

[À BOSC, À PARIS[3].]
15 octobre [1785], — du Clos.

Vous me voyez encore ici, où j’étais venue pour huit jours et où j’aurai demeuré probablement deux mois. Les arrangements économiques avaient déterminé la première résolution ; le bien-être moral et physique procure le changement d’avis. Notre mère, il est vrai, fait pendant notre absence autant de dépense que si nous y étions tous ; des étrangers prennent notre place à table ;

  1. Bosc, IV, 100 ; Dauban, II, 541.
  2. Lanthenas.
  3. Bosc, IV, 101 ; Dauban, II, 541. — M. Dauban a imprimé à tort 13 octobre.