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et je reviens à cette place où je ne sais plus ce que je voulais vous dire.

Vous ne nous parlez pas de votre santé dont nous vous avons demandé des nouvelles ; je ne sais de quel jour est votre billet, mais lui, ou la lettre qui l’a occasionné, a éprouvé du retard. Nous venons de voir le petit crapoussin de Lalande joliment bafoué dans le Journal de Paris[1] ; le voilà hautement démontré comme ignorant sur un objet où il faisait le docteur, et qui pis est, comme vilain, s’il ne veut pas augmenter le nombre des battus payant l’amende ; encore a-t-il ajouté l’insolence dont il fait montre dans ses premières réponses. Mais j’ai trouvé les journalistes bien singuliers de dire que la bienfaisance était le plaisir le plus rare que les âmes nobles puissent goûter : rare, en ajoutant délicieux, de manière qu’on ne peut prendre l’un pour l’autre, et qu’il s’ensuit qu’il n’y a guère de bien à faire dans ce bas monde, où tous sont heureux apparemment.

Nous souffrons toujours et beaucoup ; voilà deux nuits passées sans dormir. Ce clou du poignet, devenu gros, est enfin percé, mais tout n’est pas mûr encore. Battements, tiraillements, relancements, c’est une complication de sensations douloureuses et répétées. Vous jugez que l’appétit ne va guère avec cela et que le malaise est général.

Dites encore mille amitiés à notre Achate ; je voudrais lui écrire, mais je n’ai pas le temps. Adieu, portez-vous tous deux aussi bien que nous le souhaitons et que nous vous aimons.

M. de Vin, qui bientôt ira à Paris, désire vous y voir[2].

  1. Voir sur le premier Journal de Paris, 1777-1811, Hatin, Bibliogr., p. 76.
  2. Ceci marque le commencement des relations personnelles de Bosc et de M. de Vin. Elles devinrent bientôt très affectueuses, ainsi que l’attestent quatre lettres de M. de Vin à Bosc, que possède M. Beljame.