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Nous recevons des nouvelles d’un négociant de Lyon auquel mon bon ami avait écrit pour savoir des particularités de Messine et le sort de M. Lallement, pour lequel le neveu voyageur de ce négociant avait des lettres de nous. Il nous répond que M. Lallement est demeuré sept mois en France, qu’il vient de le voir à son passage à Lyon, partant de nous, surpris au possible de ne pas avoir de nos nouvelles, de nous à qui il a écrit de Paris plusieurs fois en y arrivant, et encore la veille de son départ ; ne sachant que penser de nous et partant pour Marseille d’où il va retourner promptement près de sa femme et de ses enfants.

Dites-moi si vous imaginez rien de plus contrariant ; nous voilà, par le malheur des circonstances, séparés a jamais peut-être d’un des hommes que nous estimons le plus ; il avait promis que, s’il venait à Paris, il pousserait son voyage jusqu’ici pour nous voir. Probablement, et sans doute, M. Roland était à Paris dans le même temps que lui. Où lui adresser des lettres maintenant ? Comment détruire l’impression des apparences ? Nous avions raison de le pleurer : il est toujours perdu pour nous ; mais l’attendrissement accompagnait nos premiers regrets ; ceux d’aujourd’hui ont un caractère désolant qu’on ne peut exprimer. Connaissez-vous du remède à cela ? Maudite poste ! Je suis bien fâchée que vous y teniez de quelque façon, car je chargerais d’imprécations tout ce qui s’en mêle.


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[À BOSC, À PARIS[1].]
[Fin mars 1783, — d’Amiens].

J’ai commencé ma lettre en étourdie, sans remarquer que l’ami avait écrit sur une demi-feuille qui doit être détachée et livrée à celui qu’elle regarde. Vous aurez la peine de couper cette partie,

  1. Collection Alfred Morrison, 1 folio.