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conséquence des indications que vous nous donnez, et je les solliciterai toujours avec autant de confiance que d’empressement dans l’occasion[1].

Vivat ! Notre cœur s’est épanoui lorsque nous avons lu dans le Mercure : « Mme Lallement s’est sauvée avec ses enfants, et M…, qui faisait les affaires de France en l’absence du consul, est péri. » Il est donc clair que notre ami n’était point à Messine, et que sa femme, ses enfants ont eu le bonheur d’échapper au malheur commun[2]. Il nous reste à savoir où il est ; tâchez de nous le déterrer. Je ne doute pas que l’affreuse nouvelle l’ait jeté dans la plus horrible inquiétude et n’ait peut-être changé sa marche ; nous sommes également persuadés que nous avons des lettres de perdues, parce qu’il a dû nous écrire lors de son départ. Ce ne sera pas la première fois que nous éprouverons cette disgrâce dans notre correspondance avec lui, ainsi que nous l’avons déjà reconnu. Nous voudrions présentement savoir où le prendre, et nous ne pouvons l’imaginer.

M. d’Eu prendra l’ouvrage que vous lui avez acheté ; il est en peine de tout ce qui tient à la botanique. L’ami prétend que si l’ouvrage de M. de Buffon est mauvais, il n’y aura rien de nouveau[3] ; et qu’on en peut dire, quant au fond, à peu près autant de plusieurs des choses qu’il nous a déjà données. Moi, je serais curieuse de savoir s’il promène avec autant de grâce son brillant pinceau sur les pierres et les cailloux qu’il l’a fait sur les animaux ; je crois que la nature vivante prête davantage à ses nuances et que le mérite des teintes ne doit pas ressortir également dans tous les sujets.

Le nom de M. de Lisle réveille en moi des idées de cristallographie ; mais je vous écouterai là-dessus, vous autres docteurs, et je ferai mon profit de vos observations. Mais vous qui connaissez l’abbé Bexon,

  1. Paragraphe biffé dans l’original, probabement par Bosc.
  2. Un tremblement de terre venait de détruire Messine. 40.000 personnes avaient péri. Sur M. Lallement, vice-consul en cette ville, voir la lettre du 3 janvier 1782.
  3. Buffon venait de faire paraître le premier volume de son Histoire des minéraux (1783-1785). — Voir Correspondance littéraire, juin 1783.