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pour que, du moins, je fusse interrogée. C’est une pièce curieuse par l’absurdité du fond et l’indécence du style. Tu en auras copie[1].

L’acharnement contre B[rissot] est extrême. Le tribunal révolutionnaire travaille maintenant l’affaire d’Orléans[2] et s’apprête à s’occuper de lui après. Sa situation me tourmente ; il est affreux de voir l’un des plus ardents défenseurs de la liberté exposé au sort de Sidney.

Puisse cette lettre te parvenir bientôt, te porter un nouveau témoignage de mes sentiments inaltérables, te communiquer la tranquillité que je goûte, et joindre à tout ce que tu peux éprouver et faire de généreux et d’utile le charme inexprimable des affections que les tyrans ne connurent jamais, des affections qui servent à la fois d’épreuves et de récompenses à la vertu, des affections qui donnent du prix à la vie et rendent supérieur à tous les maux !

Mille choses à nos amis, et surtout au sensible L. [Louvet].


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LA CITOYENNE ROLAND À LA SECTION DE BEAUREPAIRE[3].
4 juillet 1793, — [de Sainte-Pélagie].

L’intérêt que la section m’a témoigné, en qualité d’habitante de son arrondissement et d’opprimée, me fait une loi de l’instruire de ce qui me concerne dans l’affaire dont elle s’est mêlée[4].

  1. Madame Roland en envoya aussi une copie à Dulaure, en ajoutant en note, sur la phrase où Chabot et Ingrand ajournaient l’examen de son affaire après le vote de la Constitution : « Comme si le premier appui, le plus sût garant d’une Constitution n’était pas la justice ! Comme s’il était permis à des législateurs de se jouer de la liberté, de la réputation des citoyens, et de renvoyer légèrement à une époque indéterminée le soin de reconnaître leurs droits ou de leur assurer la jouissance ! Mais, sans doute, ce n’est pas à ceux qui les violent d’avouer leur propre tort. Que ce soit donc le public qui les juge et les redresse  » Dulaure publia la pièce, mais en supprimant ces observations. (Ms. 9533, fol. 291, copie)
  2. À la suite d’une insulte faite à Léonard Bourdon, à Orléans (15 mars), treize personnes de cette ville avaient été traduites devant le tribunal révolutionnaire ; leur procès dura du 28 juin au 12 juillet ; neuf furent condamnées à mort (Wallon, Trib. révol, I, 181-186).
  3. Publié deux fois par Champagneux (Disc. prélim., p. liv, et plus complète, t. II, p 194-195). — M. Faugère (I, 232) a donné le moins complet des deux textes.
  4. Nous avons signalé les efforts qu’a-