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la vérité n’a qu’un langage, c’est l’exposé des faits ; les citoyens qui veulent justices n’aiment pas qu’on leur adresse des supplications, et l’innocence n’en sait point faire.

P. S. Voici le quatrième jour de ma détention, et je n’ai pas été interrogée[1]. J’observe que l’ordre d’arrestation ne portait aucun motif, mais qu’il exprimait que je serais interrogée le lendemain.


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À DUPERRET,
député des bouches-du-rhône [à paris[2]].
6 juin [1793], — de l’Abbaye.

Je vous adresse, brave citoyen[3], la copie d’une lettre que j’ai écrite à la Convention, qui lui a été adressée officiellement par le ministre de l’Intérieur,

  1. Madame Roland se réclame ici de la règle salutaire qui prescrit un premier interrogatoire dans les vingt-quatre heures qui suivent l’arrestation (Constitution de 1791, chap. V, art. 11 ; Loi des 16-29 septembre 1791, 2° partie, titre VI, art. 10).
  2. Champagneux (III, 429) a le premier, publié cette lettre. M. Faugère l’a reproduite (I, 324). L’original est au dossier du procès de Madame Roland, aux Archives nationales (W 297, dossier 227, cote 6). De Perret répondit, sur l’autre pli du papier :

    S’il ne faut, vertueuse citoyenne, que de la bonne volonté et le plus intrépide courage pour seconder tous vos amis, qui sont tous les gens de bien, afin de vous délivrer de l’affreuse oppression dans laquelle vous ont réduite vos lâches persécuteurs, comptez sur moi. Je ferai, n’en doutez pas, tout ce que votre âme généreuse ferait pour moi, si, me trouvant à votre place, je réclamais vos bons offices.

    L’audace du crime voudrait vous immoler à sa rage ; mais quand on a, comme vous, le bouclier de la vertu à lui opposer, on ne craint rien ; l’écaille va bientôt sortir des yeux du bon peuple qu’on égare et il saura bien vous dédommager des maux que des scélérats vous font souffrir. Je suis plus que jamais tout à vous, ô respectable citoyenne.

    Votre ami,
    L.D. [Lauze de Perret].

    Comme cette lettre, et les suivantes que nous donnerons également en note, adressées à Madame Roland par de Perret, ont-elles été trouvées dans les papiers de celui-ci lorsqu’on les saisit, le 12 juillet 1793 ? Ce n’était apparemment que les brouillons de ses réponses. La preuve ressort précisément de celui-ci, écrit sur le second plu du billet qu’il venait de recevoir de Madame Roland.

    Toute cette correspondance de Madame Roland et de Lauze de Perret se trouve dispersée dans les éditions de Champagneux et de Faugère avec une étrange confusion. Nous la rétablissons dans l’ordre où elle a eu lieu.

  3. Claude-Romain Lauze de Perret (1747-