Page:Roland Manon - Lettres (1780-1793).djvu/1151

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

plus capable de faire ce qu’elle devrait par ses propres forces. L’avenir est gros d’événements ; nous pourrons avoir de rudes froissements ; mais il faut que la Liberté triomphe, et elle l’emportera sur les trônes réunis !


440

À M. H. BANCAL, [À CLERMONT[1].]
Samedi, 9 juillet 1791. — de Paris.

En rentrant hier au soir, à plus d’onze heures, nous avons trouvé votre paquet du 5. Moi seule j’ai pu lire ce matin vos réflexions ; je les goûte beaucoup ; vous tonnez contre la royauté que j’abhorre, parce qu’elle me parait le comble de l’absurdité, et l’une des sources des maux qui désolent la société, et vous saisissez fort bien la circonstance la plus favorable pour combattre et détruire les préjugés qui la soutiennent encore. Je crois vos arrêtés dans les principes, quoique je sois un peu embarrassée d’une convention actuelle, parce que je crains qu’il ne soit pas aisé d’en faire une bonne en même temps qu’une législature qui le soit aussi, et que, d’ailleurs, je redoute quelque confusion entre ces deux corps dans ce moment de crise où le peuple n’a pas des idées très distinctes sur la Convention. J’avais pensé, dernièrement, dans la nécessité de renouveler promptement la législature et cependant le besoin de continuer les travaux constitutionnels, qu’il aurait peut-être fallu que cette législature prochaine fût investie par ses commettants, d’une manière expresse, des pouvoirs constituants, comme par une exception particulière, uniquement due à la singularité des circonstances.

Vous demandez l’organisation de la haute Cour nationale ; je crois bien me rappeler qu’elle est arrêtée par les décrets et qu’il n’est question que de procéder à la nomination des grands jurés suivant les formes prescrites. Au reste, je ne vous fais mes observations qu’avec doute, parce que, très occupée d’expéditions, je n’ai pas eu le loisir de les méditer, et que, d’ailleurs, je n’ai pu conférer avec nos amis[2], tous entrepris ce matin par la correspondance. Il faudrait qu’il plût des adresses de toutes parts, et le meilleur moyen de les

  1. Lettres à Bancal, p. 271 ; — ms. 9534, fol. 139-140.
  2. Lanthenas et Roland, qui logeaient ensemble.