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On remue déjà diablement à Lyon pour les élections de la Saint-Martin[1] : on me mande qu’on parle de moi, et qu’à mon nom les aristocrates sont, comme on dit, des possédés sur qui l’on jette de l’eau bénite. Nous rions de la sottise ; cependant je suis très décidé à ne pas démarrer d’ici avant que les élections ne soient terminées. J’ai bien fait mon calcul, et je ne me soucie de rien : je n’en serai que plus ardent à prêcher sur les toits de la bonne doctrine. On parle beaucoup du fameux Imbert pour la place de maire ; mais je crois assez le connaître pour penser qu’il ne voudrait être nommé que pour être lavé et qu’il refuserait. Quoi qu’il en soit, je vois tant de gens intéressés à avoir là un aristocrate, que je désespère que cette municipalité soit jamais patriote.

Brissot n’a rien dis de ma motion[2], ni de ce qui s’en est suivi. Il a beau dire, je crois que, sur cet article, il est fort modifié par Blot, lequel me semble perdre son temps et devoir être un peu embarrassé de son retour.

Il a plu considérablement pendant cinq ou six jours ; c’est toujours le vent du midi, et il fait doux comme vers la fin de mai : la campagne est charmante.

Nous vous embrasserons de cœur et d’âme.


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À M. H. BANCAL, [À PARIS[3].]
1er novembre 1790, — [du Clos].

En arrivant hier de la ville, où j’avais été conduire notre petite et ramasser les nouvelles, tandis que nos amis étaient ici à philosopher et jouer au volant, nous avons lu des papiers et décidé qu’il fallait écrire à Brissot.

J’ai pensé que vous seriez sans regret le porteur de cette épître, et je vous la fais passer pour lui être remise avec le n° 51 du Courrier de Lyon.

J’ai trouvé Villefranche garni de soldats ; le régiment de Guyenne y est en garnison : on paraît en être généralement content ; il me semble aussi résulter des divers témoignages que, là comme ailleurs, les soldats aiment la Révolution et les officiers l’ancien régime. N’a-t-il pas décidé que ce ne serait que

  1. Les élections qui devaient renouveler la moitié des officiers municipaux et de notables.

    Roland, qui n’était que notable, fur élu officier municipal. Il avait espéré mieux, la place de procureur de la commune. (Wahl, p. 286-287.)

  2. Probablement la motion que Roland avait faite, le 17 septembre, au conseil général de la commune de Lyon, pour demander le renvoi des régiments étrangers qui occupaient la ville depuis les troubles de 25-26 juillet. — et la publicité des séances. — Wahl, p. 209.
  3. Lettres à Bancal, p. 114 ; — ms. 9534, fol. 62.