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ôter de la municipalité dont on a pris le maire et le procureur de la commune[1]. Vous aurez, je crois, quelques plaintes à adresser à Lamétrie[2] qui a montré votre lettre à un député de Lyon, lequel vous a dénoncé à la société des Amis de la Constitution de cette ville ; mais c’est à Lanthenas, qui s’est trouvé présent et qui a fait sentir la justesse de vos observations, à vous raconter l’aventure. Je lui remets la plume après vous avoir réitéré le tendre attachement de vos bons amis.


13 octobre 1790.

Nous[3] arrivons, mon cher ami, et je me hâte de profiter du premier courrier pour vous communiquer quelque chose de notre séjour à Lyon. Une des choses qui peut vous faire le plus de plaisir, c’est d’apprendre que le mémoire du quartier de Pierre-Seize est imprimé. On l’avait adressé seulement à M. Blot ; mais, comme la chose publique ne doit pas tenir à un seul homme, et moins encore l’affaire dont il s’agit, à celui-là, nous en avons fait adresser plus directement à l’Assemblée nationale et aux députés patriotes. Nous en avons nous-même adressé à divers membres, aux journalistes et à la société des Amis de la liberté de la presse, avec les recommandations que je vous laisse à imaginer. Nous avons pressé le mieux qu’il nous a été possible, pour que l’occasion de cette affaire soit saisie pour attirer l’attention la plus sérieuse des patriotes sur la ville de Lyon, faire sortir les troupes qui y sont et les renvoyer aux frontières. Puissent nos peines fructifier, c’est la seule récompense que je désire !

Ma dernière vous accompagnait la réponse de Lamétrie. Je vous ai dit combien j’avais été douloureusement affecté de n’y trouver que des nouvelles de gazette[4] et pas un mot de l’usage qu’il avait fait de votre lettre pour le bien de la chose publique. Je fus bien étonné avant-hier, à la société des Amis de la constitution de Lyon, de reconnaître, dans la plainte qu’y fit le président (il semblait au nom des députés de Lyon) que des membres de cette société les avaient grièvement inculpés d’impatriotisme, que c’était votre lettre qui donnait lieu à cette plainte qui d’abord fut accueillie favorablement. Le président profita de ces premiers mouvements pour proposer d’entendre la lecture de la lettre qu’on lui avait écrite. Il y était dit, après les premières plaintes, qu’un M. Desissarts, se disant avoir vu beau-

  1. Voir Wahl, 287-289. — Palerne de Savy, maire, Dupuis, procureur de la commune, avaient été élus parmi les six juges du tribunal de district.
  2. Antoine de La Métherie-Sorbier (1750-1804) était député de Mâcon à la Constituante. Son frère aîne, Jean-Claude de La Métherie, géologue et minéralogiste (1743-1817), dirigeait depuis 1785 le Journal de physique et était fort lié avec Bosc. C’est du député que parle ici Madame Roland. — Lanthenas écrivait à Bosc, le 25 septembre 1790 (coll. Morrison) : « Nous [Bancal et lui] avons écrit à Lamétrie, le député, une très longue lettre sur Lyon. Tâchez de le voir et pressez les journalistes de tourner en profitant des lumières importantes que nous avons recueillies… »
  3. Lanthenas prend la plume.
  4. Vour la lettre 381, note.