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Roland à Roncevau

le théâtre, une littérature, en un mot, presque aussi diversement organisée que celle des Latins et des Grecs, à peu près tous les genres littéraires qu’avaient connus les anciens, mais renaissant sous des aspects nouveaux, les aspects chrétiens, et tous ces genres représentés d’emblée par des chefs-d’œuvre. Le grand fait est que, dans le même temps où la fondation des ordres nouveaux, Fontevrault, Cîteaux, Prémontré, témoignait de l’ardeur religieuse de la France, dans le même temps où les maîtres des écoles parisiennes et chartraines, un Roscelin, un Abélard, un Guillaume de Champeaux, l’éveillaient à la haute culture philosophique, elle sut aussi, la France des premières croisades, par-dessus la diversité de ses dialectes et de ses patois, constituer cette belle chose, une langue littéraire, et une littérature nationale assez particulière dès l’origine pour que nous y reconnaissions, qualités et défauts, les traits distinctifs de son génie, assez généralement humaine pourtant pour que les nations cultivées, et l’Angleterre entre toutes, s’en soient éprises et inspirées. Oui, durant cette courte période de cinquante années, « la France capétienne, comme l’Athènes de Périclès, a créé pour tous les peuples », et, pour le faire voir, une seule phrase suffira, si j’y rassemble les éblouissants synchronismes que voici : c’est alors, aux alentours de l’an 1100, qu’apparaissent, comme tumultuairement, la première croisade — et encore le premier arc d’ogive — et encore le premier vitrail — et encore le premier drame liturgique — et encore le premier tournoi — et encore la première charte de liberté d’une commune — et encore le premier chant du premier troubadour : toutes créations inattendues, jaillies à la fois du sol de la France.

J’ajoute : c’est alors qu’apparaît aussi la première chanson de geste. Sous l’influence de l’exaltation