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Le Vingtième Siècle

section des recherches, savantes non moins éminentes, dans leurs diverses spécialités, que leurs confrères barbus. L’une de ces dames, sortie jadis de l’École polytechnique, section féminine, avec le no 1, avait d’abord paru s’intéresser à la jeune fille, à qui elle supposait, en raison de son entrée au grand Labo, des facultés transcendantes. Mais le fond de la science d’Estelle lui était bien vite apparu et alors elle avait, avec une moue de mépris, tourné le dos à cette représentante de l’antique et douloureuse futilité féminine.


Elle avait, avec une moue de mépris, tourné le dos à Estelle.

Estelle devint donc le secrétaire de l’ingénieur-secrétaire-général de Philox Lorris, de Sulfatin, bras droit de l’illustre savant, et cela lui plut davantage, d’abord parce que Sulfatin, qui lui montrait une certaine condescendance, ne l’intimidait plus, et surtout parce que cela la rapprochait de Georges Lorris. Alors elle passa ses journées dans le grand hall du secrétariat, prête à prendre des notes, à transmettre à l’occasion quelques ordres, ou à recevoir dans les phonos les recommandations de Philox Lorris destinées à être communiquées, comme des ordres du jour, à ses innombrables chefs de service. Philox Lorris jouait toujours du phonographe : de cette façon, c’était toujours et partout, même dans les plus lointaines usines, la voix du grand chef qui se faisait entendre et entretenait l’ardeur de ses collaborateurs.

C’est en cette qualité de secrétaire adjointe qu’elle assista maintes fois aux discussions de Sulfatin et de Philox Lorris, aux conférences avec de très hautes personnalités, conférences et discussions relatives à trois grandes, à trois immenses affaires, très différentes l’une de l’autre, qui occupaient alors presque exclusivement les méditations de Philox Lorris.

Pour être initié aux préoccupations du savant, il nous suffit d’assister indiscrètement à quelques-unes de ses conférences. Voici aujourd’hui, dans le grand hall du secrétariat, discutant avec Philox, des messieurs aux figures basanées, aux chevelures crépues, aux barbes d’un noir luisant, des mili-