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Le Vingtième Siècle

— Pas le moins du monde ; au contraire, je…

— Ta ta ta ! Vous ne vous êtes pas éprouvés sérieusement, vous êtes restés tous les deux, toi surtout, la bouche en cœur, à soupirer des gentillesses ; ce n’est pas ainsi qu’on éprouve celle dont on veut faire la compagne de sa vie… Ce n’est pas loyal, je trouve que tu as manqué tout à fait de bonne foi…


— Bigre ! quand je serai le mari de cette dame !

— Comment ! j’ai manqué de bonne foi ?

— Certainement ! Et ta fiancée aussi, de son côté ! Tu n’es pas autrement bâti que tous les autres hommes, parbleu ! et ta fiancée ne diffère pas du reste du genre féminin. Tu devais te montrer comme tu seras pendant le reste de ta vie — ainsi du reste que tous les hommes occupés — rude, distrait, grincheux souvent, emporté, violent même… Nous sommes tous comme cela dans la vie ; elle est si courte, la vie ; une fois mariés, est-ce qu’on a du temps à perdre en manières ?

— J’ai pourtant bien l’intention de ne pas me montrer aussi désagréable que cela…


— Attention ! quand je serai la femme de ce monsieur !

— Certainement, parbleu ! des bonnes intentions, ça ne prend pas de temps, on en a tant que l’on veut… mais les rapports journaliers, la vie enfin… C’est là que je t’attends ! De même une fiancée, pour que le Voyage de fiançailles constitue un essai vraiment loyal de la vie conjugale, devrait tout de suite se montrer futile, légère, contrariante, souvent revêche, portée à la domination, etc., etc., enfin, telle qu’elle sera plus tard dans le ménage. Alors, on se juge franchement, et l’on décide en parfaite connaissance de cause si la vie commune est possible : « Attention ! Quand je serai la femme de ce monsieur, je l’aurai toujours devant moi ! — Bigre ! Quand je serai le mari de cette dame, songeons-y, ce sera à perpétuité… » Voilà les sages réflexions que les personnes raisonnables doivent faire ! »

Georges se mit à rire.