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déborder la margelle, d’un vin que tu choisiras toi-même, à ton goût, le plus cher que tu voudras, car tu penses bien que je ne regarderai pas à la dépense, j’aurai les moyens !… En attendant, travaillons, tiens, passe-moi ces planches et ces rondins… Quelle chance que ta tante ait pensé à faire sa provision de bois pour l’hiver, ça m’arrange bien pour étançonner ma tranchée…

Cassagnol disparaissait jusqu’au cou dans un trou qui s’enfonçait sous la muraille, une galerie très étroite qu’il avait bien de la peine à consolider en avançant, avec des morceaux de bois et des planches.

Colombe se tourmentait fort et le conjurait de renoncer à son entreprise. Cela devenait dangereux, ces fouilles. Tant qu’il ne s’était agi que de creuser des trous en plein air dans le jardin, ce travail tout simple ne présentait guère de danger, Cassagnol ne risquait que son temps et ses peines ; il négligeait le jardinage c’est vrai, mais s’il bouleversait le jardin, par contre, dans les terres remuées les légumes n’en pousseraient que mieux. Tandis que maintenant qu’il fouillait sous la maison il devait braver des risques sérieux, de vrais dangers qui augmentaient en avançant vers le puits.

Colombe vivait dans les transes dès que Cassagnol se mettait à l’ouvrage ; elle passait sa vie à descendre dans la cave regarder dans le trou du pionnier, et à remonter surveiller les enfants, empêcher les batailles, séparer ceux qui se prenaient aux cheveux en se roulant dans l’herbe du jardin, pour redescendre encore du côté de la fouille, admonester son imprudent mari.

— Arrête un peu, Antoine, la maison craque, je te dis ! tu nous feras arriver du mal… Elle craque à chaque coup de pioche que tu donnes là-dessous ! Ce n’est pas la peine de