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— Voilà, j’en reviens à ma vieille idée, il y a le fameux trésor du Grand-Puits ; le trésor des Wisigoths, conservé tout exprès pour nous, et qui ferait de nous des seigneurs… Est-ce que tu n’aimerais pas rouler sur l’or ? Moi, j’aimerais !… Et des habits dorés sur toutes les coutures, et des bons repas !… Je jouerais de la flûte pour mon agrément seulement, pour faire danser les pitchouns et les pitchounettes… Mais il faut le trouver, le trésor des Wisigoths… Écoute, Colombe, j’irai encore en parler à ta tante, il faut qu’elle me laisse chercher, elle qui habite tout auprès du Grand-Puits où il est caché, ce trésor… J’irai, j’irai, il me le faut !

Ce fameux trésor des Wisigoths, quelle place il tient dans les rêves des Carcassonnais de la Cité ou de la Ville basse, comme on en parle dans les veillées, depuis des siècles qu’il est enfoui sous la garde des fées, dans les profondeurs mystérieuses du Grand-Puits, et qu’on cherche à l’en faire sortir.

Sur la place entre le château et la Porte Narbonnaise, il y a un beau grand puits à margelle ornée de colonnes très anciennes. Chacun sait à Carcassonne que le Grand-Puits est l’œuvre des Romains qui l’ont percé jusqu’à des profondeurs inconnues ; quelques-uns prétendent qu’il descend jusqu’au centre de la terre, mais ce n’est pas sûr ; on est certain seulement qu’il s’y embranche des souterrains allant au moins jusqu’à Lastours et au Mas-Cabardès, dans la Montagne-Noire.

Telle est la légende. Lui aussi, Cassagnol, a rêvé souvent aux Fées du Grand-Puits, surtout quand il était jeune et qu’il se penchait naïvement sur la margelle, avec l’espoir d’entrevoir peut-être quelque surnaturelle apparition.

Et il n’était pas le seul à cligner des yeux sur le noir du puits, pour s’efforcer d’en percer l’obscurité vague où