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chance, le mariage du fils Capendu ne se décide pas, la jeune fille fait des façons… Une si belle noce ! On devait danser sous l’ormeau trois jours !… Et quels festins ! n’y pensons pas, ça me donne faim… le papa Capendu devait sacrifier six tonneaux de sa récolte, du rouge et du blanc… N’y pensons pas, ça me donne soif !… Colombe ne vient pas… Tenez-vous donc tranquilles, les enfants !… Hein ? si on va souper ? mais bien sûr ! Il faut patienter, tas de petits gourmands, ce n’est pas tout à fait prêt. Voilà votre mère qui s’occupe de la cuisine…

Brusquement Colombe rentra rouge et ébouriffée.

— Eh bé ! s’écria-t-elle, c’est gai, tu fais un joli jardinier, Antoine ! Comment, Antoine, je croyais n’avoir qu’à me baisser pour cueillir une platée d’oignons, de carottes et de navets, et faire bien vite une bonne soupe au lard… sans lard… Et rien chez nous que des oignons et des carottes en bas âge, en trop bas âge !

— Ils ne seront pas prêts avant quinze jours, dit Antoine.

— Et rien que des salades !… Six salades pour toute notre maisonnée, six salades avec dix-huit navets… Antoine, tu gâches le terrain, je ne ramasse pas d’oignons, mais je trouve des œillets et des narcisses… Poète, va ! Il y a quatre rosiers là-bas dans le coin aux citrouilles, les roses sont fleuries mais les citrouilles ont pâti…

— Accommode vite les salades et les navets, gémit Antoine en courbant la tête, on se rattrapera demain…

— Tu dis toujours la même chose ! demain… demain… quand M. le Sénéchal nous aura payé nos jolis vers, ou bien quand le papa Capendu aura marié sa fille… Écoute, Antoine, ça ne peut pas durer… Tu ne… J’ai beaucoup réfléchi… Il faudrait…