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matelots à la garde du canot, & nous nous éloignâmes dans les terres.

Après un court préambule, je lui parlai de sa misère, & lui offris de lui faire sa fortune s’il vouloir s’attacher à moi & me servir. Il me dit que je l’avois traité si généreusement la première fois, que depuis ce moment il m’étoit entièrement dévoué. Je lui représentai que le service que j’exigeois de lui étoit un peu délicat, que peut-être il en seroit effrayé, mais qu’avec de la prudence & de l’adresse on éviteroit tous les dangers. Il me répliqua qu’il se sentoit capable de tout entreprendre pour m’obliger, & qu’il ne tiendroit pas à lui de sortir de l’état misérable où il étoit réduit. Croyant l’avoir amené au point où je le désirois, je m’ouvris à lui, & lui confiai que mon projet étoit de découvrir les moyens de mettre Plimouth dans les mains du Roi de France. Il me dit qu’il avoit soupçonné quelque chose la première fois qu’il m’avoit vu, à la manière dont je l’avois payé, mais que la grandeur du péril le faisoit trembler. Je ne lui donnai pas le temps de réfléchir. Voici, lui dis-je, cinquante guinées que je vous donne à compte de ce qui vous reviendra ; je vous en donnerai autant tous les mois, & vous aurez dix mille guinees si l’entreprise réussit.