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NOTES
Page 3. On parla Latin à la Cour, &c.

Lorsqu’un Prédicateur, pour être entendu des Peuples, avoit prêché en Langue vulgaire, il ſe hâtoit de tranſcrire ſon Sermon en Latin. Ce ſont ces eſpèces de traductions, faites par les Auteurs mêmes, qui nous ſont reſtées. Un tel uſage prolongeoit bien l’enfance des Langues modernes.

Il faut obſerver ici que non-ſeulement les Gaulois quitterent l’ancien Celte pour la Langue Romaine, mais qu’ils vouloient auſſi s’appeller Romains, & ſe plaiſoient à nommer leur pays Gaule romaine ou Romanie. Les Francs, leurs vainqueurs, eurent le même foible ; tant le nom Romain en impoſoit encore à ces Barbares ! Nos premiers Rois ſe qualifioient de Patrices Romains, comme chacun ſait. La Langue nationale, qu’on appella Romain ou Roman ruſtique, ſe combina donc du patois Celte des anciens Gaulois, du tudeſque des Francs & du Latin : elle fit enſuite quelques alliances avec le Grec, l’Arabe & le Lombard. Au tems de François I la Langue étoit encore appellée Romance. Guillaume de Nangis prétend que c’eſt pour la commodité des bonnes gens qu’il a translaté ſon histoire de Latin en Roman. Ce nom eſt reſté à tous les ouvrages faits ſur le modele des vieilles hiſtoires d’amour & de Chevalerie. On l’écrivoit Romans, de Romanus, comme nous écrivons temps de tempus.