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fenêtres demeurèrent closes. « Connivence manifeste des habitants avec les auteurs du rapt ! » écrira le Général Liébert[1]. Bien plutôt effet de la peur, de cette lâche peur qui, la nuit venue, verrouille le paysan chez lui, et, dans l’appel du passant en péril, n’entend qu’une invite à se terrer dans l’ombre. Que pouvaient, au surplus, sinon s’exposer aux coups, contre gens résolus et armés de toutes pièces, des villageois timides et désarmés ? Seuls les agents de la force publique étaient en mesure de donner la chasse aux brigands et d’entrer en lutte avec eux.

Par les soins de Mme Bruley, – durant toutes les péripéties du drame, admirable de sang-froid et d’énergie[2], – un exprès partit à Tours. La soirée du Préfet tirait à sa fin. La nouvelle y tomba comme foudre et jeta le désarroi parmi les personnes encore présentes. « Il faut, disaient les plus exaltés, courir sus aux brigands, les attaquer, leur arracher leur proie de vive force ; ils n’oseront pas se porter sur le prisonnier aux extrémités, puisqu’ils ont ménagé sa vie quand ils pouvaient impunément le tuer ; d’ailleurs, qui ne risque rien n’a rien ! » Si un particulier eût été en cause, l’avis sans doute aurait prévalu. Mais il y allait d’un Sénateur, d’un membre du Corps le plus considérable de l’État ; l’attentat prenait le caractère d’un crime politique ; sous le coup de

  1. Lettre au Ministre de la Guerre (Archives du Ministère de la Guerre).
  2. Dès l’arrivée à Beauvais, elle avait envoyé la fille Dansault, sa domestique, chercher du secours. Mais le jardinier, auquel celle-ci s’adressa, ne la crut pas. Au lieu de courir au village, il courut au château, où les brigands l’arrêtèrent et le mirent dans l’impossibilité d’agir.