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que l’autre enjoignait à Clément de Ris de faire livrer par le maître d’office (le nommé Lebrun) toute son argenterie. Comme il tardait, une voix cria du dehors : « Si ce bêta de Clément ne finit pas promptement, il faut le fusiller chez lui ! » Lebrun fut appelé, l’argenterie remise[1] et portée par lui dans la voiture qui avait amené Mme Bruley et qu’on avait contraint le postillon, Créhelleau, de ratteler. Après quoi les brigands invitèrent Clément de Ris à les suivre. Il ne bougeait pas : « Tuez-le à côté de sa femme ! » cria la même voix. Affolée, Mme Clément de Ris suppliait qu’on épargnât la vie de son mari, qu’on le lui laissât : « Il ne lui sera fait aucun mal », répondirent les bandits, et ils poussèrent devant eux le Sénateur.

Celui-ci, durant la perquisition, s’était surtout appliqué à gagner du temps. Il n’était pas possible que parmi les gens à son service, pour la plupart ses obligés, il n’en fût pas un pour porter l’alarme au village, pour ramener du secours. Si peu qu’il gardât d’illusions sur la reconnaissance, la fidélité, le courage de son personnel, tant d’indifférence et de lâcheté l’étonnait. Que se passait-il donc ? Il le sut en arrivant sur le perron. Dans la cour, quatre bandits, vêtus, armés comme les premiers[2], surveillaient toutes les

  1. L’argenterie livrée comprenait : 9 plats ronds, 2 cafetières, 16 cuillers à ragoûts, 2 cuillers à soupe, 6 cuillers à café, 23 couverts, le tout en argent, représentant environ 5000 livres.
  2. Voici, d’après deux notes conservées, l’une aux Archives nationales, l’autre aux Archives historiques de la Guerre, leur signalement : 1° un homme de 26 à 27 ans, pâle, mince, cheveux châtains, bouche renfoncée, taille 5 pieds 8 pouces, pelisse brune à boutons de métal blanc, cravate de soie noire ; 2° un jeune homme de 20 ans, blond, pâle, nez long et pointu, taille 5 pieds 2 pouces, pelisse et pantalon gris ; 3° et 4° deux individus habillés de pelisses vert bouteille, moins propres que les autres, auxquels ils paraissaient subordonnés, mais de figures encore plus sinistres ; 5° et 6° les deux brigands qui avaient envahi les appartements. Leurs cheveux étaient 3 noirs, 1 bai, 1 gris pommelé.