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V

Voyons, avant d’aller plus loin, quel crédit mérite cette interprétation, fondée sur des racontars auxquels leurs auteurs n’attachaient pas l’importance qu’on leur a prêtée dans la suite. C’étaient de simples commérages, des propos de couloir ou d’antichambre, dirions-nous. L’imagination les enfante, la malignité les adopte, et leur durée se mesure à celle des intérêts qui les exploitent. Parmi ceux qui leur ont donné pleine créance, qui trouvons-nous ? Principalement des écrivains disposés, par la nature de leurs œuvres, à saisir surtout le côté romanesque et dramatique des événements, tels Balzac et M. Sardou ; ou des historiens dominés, volontairement ou non, par l’esprit de parti, tels Crétineau-Joly[1] et Carré de Busserolle. L’influence des uns et des autres a pesé sur les écrivains venus ensuite, et il n’est guère pour y avoir échappé que MM. Ernest Daudet, Vandal et Madelin.

Qu’au printemps de 1800 l’on se soit préoccupé de l’hypothèse et des conséquences de la disparition de Bonaparte, qu’on en ait causé, qu’on ait imaginé des combinaisons éventuelles de gouvernement, la chose est naturelle. La politique est faite de ces éventualités et de ces combinaisons. Que Fouché ait élaboré la sienne, qu’il ait été désigné pour faire partie d’une d’entre elles, rien de plus vraisemblable. Mais on pourrait en dire

  1. Crétineau-Joly dit bien avoir tenu des preuves ; mais il n’en cite aucune, et ne cite pas davantage ceux dont il prétendait les tenir.