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Il vint en effet à Paris ayant lu déjà bien des littératures seulement, lassé de toutes, curieux insatiablement de choses nouvelles, il quitta les routes frayées, et, cherchant des rhythmes inconnus, des images irréalisées, des sensations non éprouvées, il s'engagea au hasard dans la vaste Forêt poétique. Mais, de même qu'un aventureur et capricieux voyageur, il s'y est perdu, sans trouver la clairière spacieuse où ses rêves-fées auraient pu, sous la lune magique, cueillir l'ample moisson des fleurs merveilleuses et noter le chant inouï d'oiseaux fabuleux.

Ce jeune homme n'était cependant ni un bohème ni un dilletante, ces deux vocables au son purement littéraire, n'est-ce pas ? Car ce que fut sa vie intime importe peu et il n'en faut retenir juste que les détails qui peuvent éveiller sa physionomie au miroir de notre conception. Ce qui est certain, c'est qu'ayant conscience de sa force, il venait pour. avoir sa part dans la lutte littéraire, et s'y conduire en vaillant ne sut-il pas, à l'extrémité de cette armée sans cesse décimée, mais que sans cesse aussi renouvellent de nouveaux soldats, faire une trouée victorieuse en tenant son drapeau multicolore et bizarre, assez haut, pour que tous pussent le voir et admirer cette neuve audace que