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MONITIONS 329

ambiant. L'attention ne peut se fixer, et il n'y a plus de volonté directrice. Tel est à peu près l'état mental des individus qui reçoivent une monition.

Pour la plupart des monitions, ne pas supposer qu'elles sont subjectives, c'est aussi insensé que de supposer que, dans nos rêves, les images qui nous apparaissent ne sont pas uniquement subjec- tives. Si nous voyons en rêve un enterrement, un cercueil, et, dans ce cercueil, notre frère, il serait démesurément absurde de suppo- ser qu'un cercueil a été apporté dans notre chambre avec le corps de notre frère dans le cercueil. Pourquoi en serait-il autrement dans l'hallucination véridique ? On rêve tout éveillé. Voilà tout. Et ce n'est pas une raison suffisante pour croire à un phénomène objectif que de dire : « Mais j'étais éveillé. » Gomme si la construc- tion d'un rêve devait être impossible parce qu'on se croit éveillé.

Qu'elles se produisent dans le sommeil, dans l'état intermédiaire, ou dans la veille, les monitions ont toujours le même caractère symbolique. En eux-mêmes, les détails de la vision n'ont pas plus d'importance que les détails bizarres, multiples, extraordinaire- ment fantaisistes, qui accompagnent en général tous nos rêves. Pourtant les narrateurs ont absolument raison d'insister sur ces détails; car, à côté du fait principal, de- l'essentielle monition, il y a des faits accessoires, souvent très exacts, qui permettent de préciser le phénomène. Dans ce singulier mélange de réalités et de constructions imaginaires, la lucidité va s'exercer, non seulement sur le fait essentiel, mais aussi, et quelquefois avec une curieuse prédilection, sur les circonstances extérieures accessoires. Donc dans un récit il ne faut rien omettre, car on risquerait de passer sous silence ce qui est le plus intéressant. Et cela s'applique aussi bien au rêve qu'à l'état de veille.

Ne soyons donc pas surpris de la forme symbolique de beaucoup de ces monitions, et n'attachons pas une valeur démesurée à la forme de ces divers symboles. Ce qui importe, c'est la lucidité, c'est-à-dire la perception (cryptesthésique) d'un phénomène vrai, phénomène que notre imagination agrémente de détails tantôt exacts, tantôt fantaisistes. Et je ne pense pas qu'il y ait de meilleure expression pour définir ces monitions à forme hallucinatoire que de les appeler des rêves qu'on fait tout éveillé.

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